Geler le prix des logements cette année?

Depuis quelques semaines, cette idée a refait surface: geler les loyers pour contrer les hausses ABUSIVES pour les ménages locataires. 

Partout autour du globe, l'inflation fait des ravages. Surtout pour les ménages à faibles revenus. La perturbation des chaînes d'approvisionnement depuis le début de la pandémie de COVID-19 est, entre autres, à l'origine de cette inflation. Augmentation du prix de l'énergie, de la nourriture, du coût des matières premières, dont les coûts de la construction et de la rénovation. Je n'ose même pas parler des coûts pour assurer les immeubles, qui ont subi une inflation exagérée depuis quelques années. 

Il y a même un cercle vicieux: augmentation du coût de la main-d'oeuvre et des matériaux, manque de main-d'oeuvre, ça se traduit en un coût de reconstruction plus élevé en cas de destruction complète d'un immeuble (incendie par exemple). Donc les assurances augmentent encore plus rapidement, car celles-ci couvrent les coûts de reconstruction. 

En parlant avec notre architecte pour un projet commercial cette semaine, elle m'a dit: "de ce qu'on entend avec la situation en Ukraine, le prix de l'aluminium va monter et même que l'aluminium sera plus difficile à trouver". 

Tout monte. C'est de la micro-économie. Petite offre, grosse demande, ça fait monter les prix. 

Geler les loyers, une mauvaise idée

Impact sur le prix des logements

Ces augmentations ont des répercussions certaines sur les hausses des loyers. Les augmentations des assurances et des taxes sont complètement, 100%, transférables aux occupants des logements. Pour les travaux majeurs, l'impact reste somme toute très minime sur les augmentations: une rénovation de 10 000$ dans un logement va avoir un impact d'environ 20$ par mois sur le loyer, en respectant la grille du tribunal administratif du logement (TAL). 

Je suis cependant d'accord avec une révision de la clause F des baux résidentiels, clause qui permet à un propriétaire d'un immeuble construit de puis moins de 5 ans d'augmenter à sa guise le loyer durant cette période. L'abolir, non. La modifier pour empêcher des augmentations de 500$-700$ par mois lors d'une reconduction de bail, oui absolument. Ça mène à des augmentations abusives. Il ne faut pas oublier le côté humain. 

Impact sur les plus démunis

Pour les ménages démunis, ces augmentations font cependant très mal à leur budget. Une augmentation de 40$ par mois, quand le revenu de la personne est de 726$ par mois (un adulte sans contrainte à l'emploi) ou de 870$ par mois (un adulte avec contrainte temporaire), c'est énorme. Personnellement, je crois que le problème est là: les montants des prestations d'aide sociale et des aides au loyer sont trop bas pour la réalité de 2022. 

Impact d'un gel sur les immeubles locatifs

Geler les loyers, c'est donc diminuer les revenus nets d'un immeuble: on gèle les revenus, mais les dépenses augmentent parfois de façon hors contrôle. À court terme, ce serait gagnant politiquement pour certains partis politiques. À moyen et long terme, ça n'incitera pas du tout les propriétaires à améliorer leurs bâtisses et leurs logements. La Ville de Montréal met des incitatifs pour forcer les propriétaires à améliorer leurs immeubles désuets, mais en même temps on voudrait diminuer les revenus nets d'opération des immeubles. L'équation ne fonctionne pas pour un propriétaire privé. 

Les solutions

À très court terme, la solution est d'augmenter l'aide directe au loyer versée par l'État pour les ménages démunis ou en difficulté. L'État ne peut pas geler les hausses de revenus des immeubles sans faire de même pour les dépenses. Tant qu'à ça, pourquoi ne pas geler le coût des aliments dans les épiceries? Par ce que ce serait trop compliqué. Cibler les logements serait bien plus simple... 

À court terme, il faudrait aussi encourager les gens seuls à habiter en colocation pour partager les coûts.

À moyen terme et long terme, il faut mettre des incitatifs pour faire augmenter l'offre de logements dans le marché. Il n'y en a pas assez. J'inclus l'augmentation des logements à prix modiques, construit par l'État. Ces immeubles sont déficitaires et ce n'est pas réaliste de demander à des promoteurs de construire des logements neufs pour les louer à 500$ par mois, les mathématiques ne fonctionnent pas. La population du Québec va encore augmenter durant quelques décennies avant de commencer à décroître, il faut travailler sur l'offre, partout dans la province. 

Taper sur la tête des promoteurs et investisseurs, ce serait uniquement bon pour l'élection de l'automne, ça ne règlerait rien aux problèmes du marché immobilier. 

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